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quotes (58250B)


      1 aTTENTION, ce flim n'est pas un flim sur le cyclimse. Merci de votre compréhension.
      2 Entre l'Australia et la South América, dans l'océan South Pacific : l'atoll de Pom Pom Galli.
      3 V12 appelle le capitaine George Abitbol, V12 appelle le capitaine George Abitbol. Quelqu'un vous demande sur le pont.
      4 Qui ?
      5 Un dénommé José.
      6 OK, j'arrive, V12.
      7 Ah, voilà enfin le roi de la classe ! L'homme trop bien sapé, Abitbol !
      8 Alors comme ça tu as été élu l'homme le plus classe du monde ! Laisse-moi rire !
      9 Style le grand play-boy des fonds marins, genre qui fait rêver les ménagères. Sauf que moi je les baise, moi, les ménagères, non ? C'est pas vrai ?
     10 Écoute-moi bien, mon petit José. Tu baises les ménagères, bien, tu dois avoir le cul qui brille. Mais c'est pas ça qu'on appelle la classe.
     11 Je te dis ça en qualité d'homme le plus classe du monde.
     12 Eh, je t'arrête tout de suite. La classe, c'est d'être chic dans sa manière de s'habiller.
     13 Rien de tel que d'aller chez Azzedine Alaia… ou même de s'acheter des sous-pulls chez Yohji Yamamoto !
     14 Excuse-moi de te dire ça, mon pauvre José, mais tu confonds un peu tout.
     15 Tu fais un amalgame entre la coquetterie et la classe. Tu es fou.
     16 Tu dépenses tout ton argent dans les habits et accessoires de mode mais tu es ridicule. Enfin si ça te plaît…
     17 C'est toi qui les portes. Mais moi, si tu veux mon opinion, ça fait un peu… has been.
     18 La vache !
     19 Moi, j'ai l'air has been ?
     20 J'en ai pour plus d'une barre de fringues sur moi. Alors, va te faire mettre !
     21 Tu n'es vraiment pas très sympa. Mais le train de tes injures roule sur le rail de mon indifférence.
     22 Je préfère partir plutôt que d'entendre ça plutôt que d'être sourd.
     23 Bien ! Considère qu'on n'est plus amis, Abitbol !
     24 Tiens, regarde ! Les Anglais ont débarqué. On va être obligés de passer par derrière. Tu sais, par ce tunnel tout sombre qui sent pas très bon.
     25 Oh, George ! Quel poète, vous me surprenez. On ne m'a jamais parlé comme ça. J'ai connu des hommes, mais jamais des comme vous !
     26 Eh, tu sais à qui tu parles, là ?
     27 Oui !
     28 Abritons-nous, ça va pas tarder à péter !
     29 Oh, et encore c'est rien !
     30 Classe, bravo. Bon, pousse-toi, laisse-moi passer.
     31 Bon V12 c'est quoi ce bordel alors ?
     32 Ben ce bordel c'est qu'il pleut comme vache qui pisse !
     33 Ah bravo, merci du renseignement.
     34 Heureusement que tu es là.
     35 Mais patron !
     36 Quoi patron ? Tu veux que je dise à tout le monde que ton vrai nom c'est pas V12 c'est travers de porc sel-poivre ?
     37 Bon, je vais chercher des serviettes-éponges avec des imprimés dessus. Ah, celle-là. Non. Celle-là… Ah, celle-là, ça va.
     38 Ça, c'est bon, c'est épongé.
     39 Ça, c'est bon, c'est réparé.
     40 Ça, ça roule.
     41 Oh putain et ça ? Faut pas laisser ça comme ça les enfants !
     42 George ! George ! Oh mon Dieu George ! Oh ! Oh !
     43 Aah… Monde de merde.
     44 Oh George…
     45 Et puis je vous rappelle la principale information de cette édition, la disparition subite de George Abitbol, qui depuis plus de 15 ans portait officiellement le titre de l'homme le plus classe du monde.
     46 L'Amérique vient de perdre un de ses plus prestigieux ambassadeurs.
     47 Et maintenant, un petit peu de musique avec Alain Souchon.
     48 Oh non, pas lui ! (Il éteint la radio.)
     49 Salopes !
     50 Bonjour patron, je peux entrer ?
     51 Ah Dave, tu tombes bien. Entre.
     52 On prépare un dossier sur George Abitbol. Tu vas te mettre sur le coup, mais tu seras pas tout seul, tu seras avec Peter et Steven.
     53 Peter et Steven, je les aime bien. Mais pourquoi je peux pas travailler seul ?
     54 Parce que tu es trop mauvais.
     55 Ah ben là patron vous m'avez convaincu, c'est une bonne raison.
     56 Je vais travailler avec Peter et Steven.
     57 Ben alors ?
     58 Ben OK, j'y vais.
     59 Ce charlot ? Je savais pas qu'il existait encore.
     60 Va falloir vous y habituer parce qu'il va travailler avec vous sur ce dossier. C'est une idée de notre ami Callaghan.
     61 Une idée lumineuse !
     62 Roh arrêtez vos conneries, patron. C'est mon fils, mon fiston. Pff.
     63 Je sais pas pourquoi, il s'est attaché à moi. Alors, je l'aide.
     64 Ben peut-être qu'il avait personne d'autre à qui s'attacher. Mais de quoi on parle ?
     65 Je vais te dire de quoi on parle.
     66 Où vous en êtes avec la nécro de George Abitbol ?
     67 Vous bossez un peu ?
     68 Mmh ?
     69 On vient de s'y mettre, mais on a déjà quelques petites idées.
     70 On va interroger des tas de gens, tous ceux qui l'ont aimé, qui l'ont haï, bref tous ceux qui l'ont approché qui l'ont connu. Ça fait déjà du boulot.
     71 Quoi d'autre ?
     72 Ah et puis c'est pas tout.
     73 Oui, on a pensé qu'on devait expliquer ses dernières paroles.
     74 Monde de merde ? Vous avez raison.
     75 Oui, on en a chié pour trouver cette idée, on a été charrette.
     76 L'homme le plus classe du monde meurt, et ses dernières paroles c'est « monde de merde ». Pourquoi il a dit ça ? C'est ce que je veux savoir.
     77 Merci, c'est pas facile à trouver.
     78 C'est sûrement un nom. Si c'est une femme, je veux savoir quelle femme, si c'est un cheval je veux savoir dans quelle course.
     79 Nous, on pensait que ça pouvait être un traineau.
     80 Bonjour. C'est moi, Orson Welles, et ceci est ma maison que vous voyez, derrière, là. Pas mal, non ? C'est français. Je me permets d'interrompre ce flim parce qu'on se fout un peu de ma gueule. C'est du vol et du plagiat. J'aime pas trop les voleurs et les fils de pute.
     81 Dans ce film le héros meurt au début et des journalistes décident d'enquêter sur ses dernières paroles, comme dans Citizen Kane. J'appelle ça du plagiat.
     82 Les journalistes vont interviewer des gens sur le héros. Vous allez voir que les témoignages, ça va être des flashbacks. Je le vois trop arriver.
     83 (Quelqu'un tire sur Orson Welles.)
     84 Argh, Rosebud !
     85 Bon, et à part ça ?
     86 Ben à part ça on est un peu coincés, on n'a pas l'ombre d'une piste.
     87 Vous savez qu'il a vécu au Texas la moitié de sa vie. Vous cherchez par là.
     88 Faut chercher par là, faut chercher par là… Vous êtes gonflé, vous. Chercher par là.
     89 Bravo, quel enthousiasme.
     90 Mais au fait, j'y pense, Callaghan, il devrait pouvoir vous aider, depuis le temps qu'il est là, payé à rien foutre, autant qu'il serve à quelque chose ce gros porc.
     91 Je suis peut-être payé à rien foutre, mais mes tuyaux, je les garde pour mon fils.
     92 Mais comprenez-moi mes amis, c'est mon fils, ma bataille, c'est le fruit de mes entrailles quoi.
     93 J'avais un nom et une adresse, ben je lui ai donné.
     94 Oh le lourd.
     95 On dirait que ça vous emmerde, je me trompe ?
     96 Connasse.
     97 C'est vous qui m'avez traitée de connasse ?
     98 Mais non.
     99 Vous savez c'est pas très agréable.
    100 Bonjour, je viens voir un certain monsieur Hugues.
    101 Euh c'est quoi ça ?
    102 Oh va te faire foutre.
    103 Vous dites que j'aille me faire foutre ? Euh OK, j'y vais.
    104 Ttt, quel con !
    105 Bonjour Monsieur, vous cherchez quelque chose ?
    106 Oh ! Euh, vous devez sans doute être monsieur Hugues ?
    107 J'ai une lettre à vous montrer.
    108 Avant de me la montrer, je voudrais bien vous poser une question. À qui ai-je l'honneur ?
    109 Dave, je suis le fils de monsieur Callaghan.
    110 Faites-moi voir votre papier, là… Vous faites une enquête sur George Abitbol, l'homme le plus classe du monde ?
    111 Oui ! Vous l'avez connu, vous, hein ? Mmh ?
    112 Vous savez, George je l'ai connu au temps du Texas. Il est encore cowboy. À l'époque, j'étais moi-même cowboy, je vivais avec Jacques, un bon copain. Il y avait rien de sexuel entre nous. Je dis ça parce que je me suis souvent fait traiter de pédale, de salope et c'est facile de traiter les gens de pédés, tout ça parce que deux garçons vivent ensemble dans un ranch et portent des pantalons en cuir.
    113 Bref, un jour un cavalier est arrivé à fond les ballons avec une lettre.
    114 Eh, les pédés il y a une lettre pour vous ! Tenez. Bonne bourre !
    115 Pauvre con, va !
    116 Bon, il y avait quoi dans cette lettre ?
    117 J'en sais rien. C'est pas moi qui l'ai lue, c'est Jacques.
    118 Bon ben racontez-moi des choses que vous savez, pas du rien !
    119 OK, OK, du calme. Je sais pas ce qu'il y avait dans la lettre, mais après on est partis à cheval vers la ville de George.
    120 Ah j'en ai marre. Ah je te jure, les voyages à cheval ça me fatigue.
    121 Qu'est-ce que tu as ?
    122 Oh j'ai que je commence à en avoir vraiment marre des voyages. Je rêve d'un bon bain dans une bonne auberge.
    123 Ah je te jure. J'ai les pastèques.
    124 Yep. Yep. Yep. Yep. Yep.
    125 Ben qu'est-ce qui te prend à dire « yep » comme ça ?
    126 Ben c'est pour dire « yep ».
    127 Ah, c'est pas banal, ça.
    128 Chaud devant ! Et voilà, la spécialité du chef.
    129 Parfait, ça a l'air super bon !
    130 Bon, maintenant qu'on est là, tu vas peut-être me dire pourquoi on est venus ?
    131 Tu reçois une lettre mystérieuse, et on arrive en courant.
    132 J'aimerais bien savoir ce qu'il y avait dedans.
    133 Ah, c'est une longue lettre épistolaire de mon ami Dino, qui m'appelle à la rescousse pour me demander de l'aide, pour George qui va mal.
    134 Qu'est-ce que ça peut te foutre qu'il aille bien ou mal, ce tâcheron ? De toute façon, j'ai jamais pu l'encadrer.
    135 Merci de m'appeler tâcheron ! Ça fait toujours plaisir à entendre, surtout de la part de deux pédés. Vous savez ce que vous mangez, là ?
    136 Non ?
    137 C'est du steak avec des boulettes d'entre les doigts de pied. Ça a bon goût.
    138 C'est très agréable, Monsieur, je vous remercie.
    139 Et la sauce c'est de la morve séchée.
    140 Tais-toi, tu fais chier. Tu vas finir par les dégoûter.
    141 Mêle-toi de tes affaires, toi. Tu sais bien que madame Felipe, la patronne se coupe les morceaux de nichon pour en faire des ravioles.
    142 C'est dégueulasse, merde !
    143 Attends c'est censé être l'homme le plus classe, il va sans doute nous présenter ses excuses.
    144 Tu sais tes excuses tu peux te les coller au cul, tout comme ton bifteck, sauf que le bifteck, ça sert à rien, le patron l'a déjà fait.
    145 Il a craché dessus.
    146 Ah non, pas craché. Le patron, il crache pas dans les plats.
    147 Allons, vieux, même dans les grands restaurants on crache dans les plats, alors dans ce taudis, je vois pas pourquoi ils se feraient chier.
    148 Allez, je vous laisse manger, bon appétit.
    149 J'ai connu un mec de droite une fois, il avait dix fois plus de classe.
    150 Ah, encore une chose. Je vous conseille d'éviter la mousse au chocolat du patron.
    151 Et qu'est-ce qui s'est passé après ? Respirez bien.
    152 Après, tout ce que je sais c'est que j'ai eu un accident. J'ai été blessé. Alors, je me suis réveillé amnésique et j'arrivais plus à me souvenir de rien.
    153 Vous avez d'autres choses à me raconter ? Sur George ?
    154 Je refuse de manger des ravioles. Mais par contre, je peux vous parler de madame Felipe. Elle s'est fait refaire les nichons, elle. Et je sais de quoi je parle.
    155 Et George, dans tout ça ?
    156 Ben justement, une fois j'étais chez les Indiens bilingues.
    157 Salut, Hugues !
    158 Hugh.
    159 Hello !
    160 Salut, Hugues !
    161 Hugues, salut !
    162 Salut les gars, je suis content de vous voir. Comme je passais par ici, je pensais m'arrêter un peu, à moins que vous vouliez que je parte ?
    163 Tu peux rester. Pas de problème. Je suis même content que tu sois venu chez nous.
    164 J'aimerais bien que tu restes. On va manger des chips.
    165 Tu entends ? Des chips ! C'est tout ce que ça te fait quand je te dis qu'on va manger des chips ?
    166 Mais qu'est-ce qui t'arrive ? Pourquoi tu dis rien, tu fais la tronche ou quoi ?
    167 Tu me rappelles George, politiquement.
    168 George ? Qu'est-ce que j'ai à voir avec George ? Rien en fait !
    169 Parce que si on réfléchit bien, moi je suis un vrai démocrate.
    170 George est un fasciste de merde. Un fasciste de merde !
    171 C'est exact. Au temps pour moi.
    172 Oh, et qu'est-ce qui lui est arrivé, à ce chef indien ?
    173 Après, il a fait justicier dans la ville. Mais aujourd'hui, il a fini de frimer. On l'a retrouvé assassiné un jour. Il en est mort.
    174 Pfft ! Dites-moi, le numéro de votre ami Jacques, c'est bien celui qui est noté là ?
    175 Oui.
    176 Je vais le donner à mes collègues. Faut qu'on l'interroge.
    177 Allo Peter ? Prends un papier, je vais te donner le numéro d'un certain Jacques, faudrait l'interroger. Alors c'est le 19 94 0 18 13 24 32 49 26 24 40 4 16 70933, 16 moins 4 euh, attention il y a un piège…
    178 16 moins 4, 12. Bon euh merci, on l'appelle. Ciao.
    179 Bon on se rappelle, à plus tard.
    180 Bonjour, vous êtes bien chez Steven, je ne suis pas là, mais vous pouvez laisser un message après le bip sonore. Merci, au revoir.
    181 Je viens de recevoir un coup de téléphone de Dave. Tiens, c'est le numéro de Jacques.
    182 Tiens regarde, ça c'est le numéro de Jacques. Je l'ai trouvé aux archives. Le numéro qu'il t'a filé, Dave, c'est de la connerie. Il commence vraiment à me faire chier, Dave.
    183 Moi ce qui me fait chier c'est les effets spéciaux minables. Je supporte plus.
    184 Oh ben là je te trouve un peu dur, on croirait entendre un pro des effets spéciaux.
    185 Oh ben moi quand tu veux. Tiens, tu connais l'effet spéciau de la sonnette ? Dring ! Tiens, dring, dring, dring ! Tiens, et dring dring !
    186 C'est super impressionnant.
    187 Et après je te fais dring ! Et puis dring ! Et puis même encore dring !
    188 Oh putain je suis impressionné.
    189 Allez un dernier, dring ! Maintenant, tu appelles Jacques.
    190 Rheuuu.
    191 Allo, monsieur Jacques ?
    192 Absolument.
    193 Bonjour je vous appelle parce que j'enquête sur George Abitbol et j'aimerais beaucoup recueillir votre témoignage. (À Peter.) C'est bon !
    194 Écoutez, n'y voyez aucune mauvaise volonté de ma part, mais je tiens à vous dire que je n'ai pas beaucoup de temps. Alors pour George Abitbol, je veux bien faire un effort. Mais il faut pas me prendre pour la bonne poire.
    195 Je vous remercie, vous êtes très gentil. Attention, j'ai bien dit gentil, j'ai pas dit homosexuel, hein. J'ai dit gentil parce que dans le témoignage de Hugues il est noté que vous êtes parti dans la ville de George en ayant reçu juste une simple lettre. Qu'en est-il exactement ?
    196 Absolument. Je pense que vous faites allusion à cette missive que nous reçûmes un jour, Hugues et moi. Cela avait l'air urgent, à en croire la hâte du cavalier du Poney Express.
    197 En effet l'expéditeur avait pris soin d'écrire au dos de l'enveloppe « presse le pas, facteur, car l'amitié n'attend pas ! ». La lettre provenait d'un ami, Dino, qui me demandait de lui venir en aide.
    198 Bref, en un mot comme en cent, nous nous mîmes en route promptement.
    199 Oh, tu nous fatigues, qu'est-ce qu'il y a encore, tu n'arrêtes pas de te plaindre !
    200 J'ai faim.
    201 Écoute-moi bien Hugues mon ami, plus que quelques kilomètres et nous serons dans une bonne auberge.
    202 Quel trouble-fête !
    203 Yep. Yep.
    204 Je vous interromps, excusez-moi, mais cet épisode nous a déjà été raconté par Hugues. Peut-être pourriez-vous nous parler de ce qui vous est arrivé après ce repas dans la bonne auberge, hein ?
    205 Absolument. Après déjeuner, il était temps que je me misse à l'ouvrage, j'allâme voir mon ami Dino.
    206 Ooh !
    207 Ben Dino, mon pauvre ami ! Ça n'a pas l'air d'aller bien fort.
    208 Oh, euh, pourquoi vous vous êtes mis dans cet état déplorable ? Vous qui écrivez de si belles lettres !
    209 Ça va plus du tout. J'ai plus envie de boire ni de manger. J'ai plus envie de me peigner. Je suis limite nervous breakdown. Boah et puis merde, j'ai même plus envie de me laver !
    210 Vous allez pas me dire que c'est à cause de George, quand même ?
    211 George ? Vous pouvez pas savoir. Il est devenu insupportable.
    212 Mais c'est pas une raison pour plus vous laver les joues, vous êtes malade ou quoi ?
    213 Mais faut arrêter !
    214 Ce que j'arrête, c'est les pin's, vieux. Ça me fait plus marrer.
    215 Oh mais dites-moi, vous savez que vous avez l'air pitoyable ? Parce que pour arrêter votre collec'…
    216 Ça vous embête si je regarde votre pin's ?
    217 Shera… Sheraf ? Connais pas.
    218 Parce que moi aussi je peux me vanter de ma collec', moi. Ça fait un moment que je l'ai, et c'est pas une collec' de pédé !
    219 Sauf que celui-là je le connais pas. Sheraf.
    220 Inconnu au bataillon.
    221 Sheraf. Tu connais pas Sheraf ? C'est un groupe, ils étaient number one.
    222 C'est pas une raison pour vous laisser aller et ressembler à une larve.
    223 Regarde mes mains, saloperie ! Regarde, je me suis niqué les mains, moi, avec cette saloperie de collec' de pin's à la con.
    224 Bon, euh moi j'y vais. Merci pour les pin's.
    225 Et vous inquiétez pas, euh, tout va s'arranger. Et comme on dit chez nous, lehaïm !
    226 Lehaïm !
    227 Bonsoir !
    228 Pédé !
    229 Ben ! Ben c'est pas banal.
    230 Ça commence à être pesant cette histoire de pédés. Tout le monde s'acharne sur nous alors qu'on n'est même pas pédés.
    231 Ben oui, je sais. T'inquiète pas, je vais aller le voir dès demain, George.
    232 Allez, bonne nuit !
    233 Ouais.
    234 Dors bien.
    235 George, il faut que je vous parle.
    236 Je sais bien que sous prétexte que je suis gentil, les gens me prennent souvent pour un truffon. Soit, j'en prends mon parti.
    237 N'empêche, je crois qu'on a à parler.
    238 Visiblement, vous n'allez pas bien. Laissez-moi vous aider.
    239 Casse-toi, Jacques.
    240 Oh ça, mais vous refusez le dialogue ?
    241 Exactement, je veux pas qu'on parle. Je veux que tu quittes la ville. Tu as intérêt à te casser avant neuf heures.
    242 Mais George, rassurez-moi…
    243 Vous seriez pas un peu en train de me prendre pour un con, des fois ?
    244 Si, complètement, même.
    245 Ah.
    246 Et casse-toi, maintenant.
    247 George, vous me décevez. Je m'attendais à plus d'ouverture d'esprit de votre part.
    248 Tu parles.
    249 Je vous aiderai, malgré vous.
    250 (L'horloge indique neuf heures moins dix.)
    251 Rester en ville malgré les menaces de George, je trouve ça drôlement courageux de la part d'un pédé comme vous.
    252 Eh, bon, c'est fini, oui ? Ça, c'est une rumeur. J'ai jamais été homosexuel, et encore moins pédéraste.
    253 C'est fou que vous ayez tant de complexes.
    254 (L'horloge indique neuf heures moins cinq.)
    255 Allez, dites-le que vous êtes pédé !
    256 Avouez, vous êtes en train de choper la honte.
    257 Et quand bien même je serais homo, je vois pas ce que ça change.
    258 En string vous devez être bonne.
    259 Sois prêt. C'est bientôt l'heure. Cigarette ?
    260 (L'horloge indique neuf heures moins une.)
    261 Bon, très bien, je vais tout vous dire puisque…
    262 (George tire un coup de feu.)
    263 Oh ! Il est neuf heures !
    264 Neuf heures !
    265 Il est déjà neuf heures, là ?
    266 Sur mon front il y a pas marqué radio-réveil.
    267 À part ça, vous avez la classe !
    268 Tu vas voir la classe. Putain de zen. Nardine.
    269 Où ça nous mène, la folie des hommes. On court tout droit à notre perte.
    270 Hé patron, j'ai trouvé de la dynamite.
    271 Ça me donne une idée.
    272 Eh, les minables ! Il y a pas que moi qui suis pédé, il y en a un autre et il s'appelle George !
    273 C'est ça, cause, cause. Salaud !
    274 Et toi, sale parasite, casse-toi !
    275 Ça il va le payer !
    276 Ouais.
    277 Il devait être nerveux, le George, pour s'énerver comme ça.
    278 Vous voulez que je vous raconte la fin de l'histoire ?
    279 Oui s'il vous plaît, Monsieur. J'imagine que vous avez dû appeler la police. Vous étiez dans votre droit après tout.
    280 Pas du tout, nous avons réglé cette histoire entre hommes.
    281 Ah bon ?
    282 Absolument. Voyez-vous, Hugues fut gravement blessé. George est venu s'excuser immédiatement.
    283 George, s'excuser, immédiatement ?
    284 Absolument.
    285 Quelle classe !
    286 Absolument.
    287 Hugues.
    288 J'ai su que tu étais blessé. Je suis venu m'excuser.
    289 Il fallait y penser avant, au lieu de venir pleurer dans ma chambre.
    290 Ouais, c'est vrai, c'est minable. C'est tout moi, ça. Mais j'espérais tout de même te faire… plaisir.
    291 Mon plus grand plaisir serait que tu te calmes, gros blaireau.
    292 Eh oui. Je m'énerve.
    293 Ah ben donc si je résume, George n'a eu à vous faire qu'un mea culpa.
    294 Dites, vous êtes drôlement gentil, vous.
    295 Arrêtez de dire ça. Je suis pas gentil, c'est pas vrai. Quand je m'énerve, je me mets dans des états dingues. Je suis méconnaissable.
    296 OK, excusez-moi. Je peux vous poser une dernière question ?
    297 Absolument.
    298 Voilà, euh, à quoi vous pensez si je vous dis « monde de merde » ?
    299 Au revoir.
    300 (Jacques raccroche.)
    301 Pourquoi tu as choisi de faire ce boulot-là, toi ?
    302 Ben si je fais journaliste c'est évidemment pour être célèbre. Moi je veux être connu. Tu sais pourquoi ? Pour niquer les gonzesses. Quand tu es célèbre, tu niques plein de gonzesses. Et puis aussi tu bouffes des trucs bien meilleurs qu'ici.
    303 Et moi pour les gonzesses je suis super d'accord avec toi. Mais pour la bouffe je vois pas ce que tu veux dire. Tu aurais envie de manger quoi exactement ?
    304 Ben je sais pas, par exemple une quiche lorraine.
    305 Une ouiche.
    306 Quoi ?
    307 On dit « une ouiche lorraine ».
    308 Tu es sûr ?
    309 Ça fait bizarre, « ouiche lorraine ».
    310 Bon, on va où, là ?
    311 Ben on va voir Dino, le mec qui a écrit la lettre à Jacques.
    312 Attention ! Quels connards ces piétons !
    313 Ouais.
    314 Qu'est-ce que tu disais, là ?
    315 Hein ? Oh rien, rien, des conneries. Laisse tomber.
    316 Je sais pas toi, mais moi le mystère s'épaissit.
    317 Messieurs, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue. D'ailleurs, il faut pas rester debout, asseyez-vous, mettez-vous à l'aise.
    318 Merci Monsieur, c'est très gentil.
    319 C'est une leçon de savoir-vivre.
    320 C'est naturel. Mais dites-moi plutôt ce que je peux faire.
    321 Oui alors voilà. Nous sommes journalistes et nous voudrions savoir où vous avez connu…
    322 George Abitbol.
    323 Euh, ah oui. George Abitbol.
    324 Où j'ai connu George ?
    325 C'est une excellente question. À la ferme.
    326 La ferme ? Quelle ferme ?
    327 Ah la ferme ta gueule toi, ducon, espèce de crétin. Qu'est-ce que tu veux, nous prendre la tête, là ? Pauvre con.
    328 Oui je l'ai connu à la ferme. On était des cowboys. On vivait à la ferme, ça a rien d'étonnant.
    329 Merci, c'est très agréable. Non mais c'est vrai, je me fais engueuler devant des journalistes qu'on connaît même pas.
    330 C'est classe, bravo.
    331 Oh ça va, on vous fait pas chier, là ? Non c'est sûr. Non mais je rêve. Dites-moi, vous avez envoyé une lettre à Jacques il me semble. C'était quoi, cette lettre ?
    332 Eh bien, cette lettre, c'est vraiment très simple. J'avais un problème avec George. J'ai écrit à mon vieil ami Jacques.
    333 Mais si vous le voulez bien, je vais tout vous raconter depuis le début. Vous savez, j'arrivais d'Italie, de Turin. À l'époque j'étais supporter de la Juventus.
    334 (Un coup de feu retentit.)
    335 OK, j'arrive ! Arrête de tirer sur oim.
    336 Mouais.
    337 Viens ici.
    338 Qu'est-ce que tu fous avec les bras en l'air ? Je t'ai dit de les lever ?
    339 Baisse tes bras, c'est moi qui les lève.
    340 Ah non, c'est à moi de les lever.
    341 Non, c'est à moi de les lever. C'est moi qui décide.
    342 Et puis d'ailleurs, arrête de faire tout comme moi.
    343 Baisse les bras et prends ton flingue, au lieu d'être là à me copier.
    344 Mon flingue ? Avec plaisir.
    345 Tout compte fait, je préfère garder mon flingue. Désolé. Et je vais partir avec mon cheval, vieux.
    346 Il y a pas de problème, comme tu veux. Je vais juste le préparer pour toi.
    347 Non, j'ai changé d'avis. Tu prends le cheval et tu te casses.
    348 OK.
    349 Putain je me suis mal démerdé ! Pourtant, j'ai pas fait une concession !
    350 Le temps a passé… Je pensais ne plus jamais revoir ce type, mais un an après, nos chemins se sont croisés une nouvelle fois.
    351 Je fréquentais alors un bar que le patron, un certain Bazounga, avait intelligemment baptisé le Orlando's.
    352 Mais je te reconnais, toi, je t'ai déjà vu quelque part. Je suis sûr que je te reconnais.
    353 Désolé, mais c'est moi qui te reconnais. Je t'ai vu le premier. Toi tu m'as vu en deuxième, vu ?
    354 Ben je t'ai vu le deuxième alors, voilà.
    355 Perdu ! C'est aussi moi qui t'ai vu le deuxième.
    356 Oh dis donc, tu es super fort.
    357 Mais je suis pas super fort, je suis mieux que ça même, je suis surpuissant.
    358 Bon, ben lui il va me prendre la tête.
    359 Ça fait plusieurs fois que je te croise. Tu es toujours sur mon chemin, tu veux quoi ?
    360 Mais c'est peut-être toi qui es sur mon chemin, pas moi.
    361 C'est pas mal, ça, le pin's sur la cravate.
    362 C'est la classe.
    363 Mais au fait, toi d'où tu viens ?
    364 Moi, je suis juif.
    365 Tu es juif, toi ?
    366 Oh oui je suis juif. Et si tu veux tout savoir, je suis même juif arabe.
    367 Juif arabe ? Je préfère les séfarades, tu sais. À mon avis, juif et arabe c'est bizarre.
    368 Moi j'aime pas les gens bizarres.
    369 Oh merde. Je peux pas encadrer les nazis. Mais laisse tomber.
    370 Précise ta pensée ?
    371 Pour être tout à fait exact…
    372 Oui ?
    373 Je pense que tu es un ouf, toi. Un ouf malade.
    374 Mmh.
    375 En plus, c'est du racisme.
    376 Ça c'est ton opinion personnelle, que je suis raciste.
    377 Si tu veux mon avis, s'il y a un raciste ici, c'est oit.
    378 De toute façon, ça sert à rien de discuter avec toi, tu as toujours raison.
    379 Si, ça sert de discuter. C'est toi qui as toujours raison.
    380 Qu'est-ce que j'apprends, Frankie ? Espèce de malhonnête.
    381 Il paraît que tu as des propos intolérables, où il y a pas de tolérance ?
    382 Tu sais donc pas que c'est pas bien, d'être raciste ? Que c'est mal ? Qu'on ne doit pas faire de discrimination raciale, c'est mal.
    383 Juger les gens sur leur religion, c'est mal. Sur leur couleur de peau, sur leurs origines sociales ou sur leur nationalité, c'est mal.
    384 OK, puisque je vois qu'on peut pas discuter, on va faire un duel.
    385 Enculé de ta race !
    386 (Frankie tire.)
    387 (Jacques tire.)
    388 J'adore les duels inoffensifs.
    389 Et maintenant, casse-toi.
    390 La prochaine fois, je m'occuperai de toi avec de vraies balles.
    391 Et ça chauffera pour ton cul. Sale Français !
    392 Oh, je suis même pas Français. Je suis Américain.
    393 Non, tu es Français. Moi, je suis Américain !
    394 Et voilà, c'est pour ça que je l'ai appelé mon vieil ami Jacques. Je veux pas dire, mais c'est un mec qui a vraiment plein de qualités.
    395 Ouais, moi je me demande quand même s'il était pas un peu con.
    396 Parlez-nous du contenu de cette lettre.
    397 Euh oui s'il vous plaît. À moins que ça soit privé et que vous ayez des principes.
    398 Mais c'est privé, et j'ai des principes. Mais comme vous m'êtes sympathiques, je vais vous raconter ce qu'il y avait dans la lettre.
    399 Merci, c'est gentil à vous.
    400 Il y a pas de mal, vous m'êtes sympathiques.
    401 C'était un soir. J'avais le spleen, le blues.
    402 Mon cher Jacques, je vous écris parce que j'ai besoin de vous.
    403 C'est George qui a besoin d'aide. Il ne supporte plus la vie au Texas, pas de clim' quand il fait chaud, pas de téléphone, pas de télé, pas de chauffage…
    404 Bref, il supporte mal de ne pas avoir une vie moderne. Ça le rend irritable.
    405 Hier…
    406 Bonsoir George, j'aimerais beaucoup vous parler.
    407 (George lui met un gros pain dans la face.)
    408 Si tu veux me parler, envoie-moi un… fax !
    409 Un fax, non mais des fois. Faut vraiment qu'il aille mal.
    410 Et en plus avant c'était pas comme ça. Avec George, je me souviens, on passait des après-midi entières à rester dans notre chambre à se chamailler gentiment, à se raconter des souvenirs…
    411 Tu veux que je te raconte un souvenir ?
    412 Un souvenir ? Oh oui.
    413 Laisse tomber, tu te fous de ma gueule ?
    414 Oh non je me fous pas de votre gueule, jamais de la vie.
    415 Eh bien, je vais te raconter l'histoire de ce malade qui s'est pointé un soir dans ma chambre d'hôtel. Un putain d'énergumène.
    416 Bonsoir. Qu'est-ce que vous faites dans ma chambre ?
    417 Vous avez un truc à me demander ?
    418 Aime-moi tendre, aime-moi vrai.
    419 Ça veut dire quoi ces conneries ?
    420 Ça veut dire aime-moi tendre et aime-moi vrai.
    421 Moi ce que je vois, c'est que dans deux secondes je vais te botter le cul.
    422 Bon écoute, tu peux faire tout ce que tu veux mais évite de marcher sur mes chaussures en suédine bleue.
    423 C'est quoi ça ?
    424 Ne sois pas cruel. Un pour l'argent, deux pour le spectacle, et trois pour le caillou.
    425 Et voilà, c'était mon souvenir. En tout cas s'il cherchait pour du trouble, il est venu à la bonne place.
    426 Voilà. Malheureusement aujourd'hui c'est bien fini. George n'est plus le même homme.
    427 C'est pourquoi vous devez venir, mon cher Jacques.
    428 Et voilà, je pense que maintenant vous voyez mieux le type de problème que j'avais avec George et pourquoi j'ai écrit cette lettre.
    429 Tu peux me dire ce qu'on fait dans ce flim, Bob ?
    430 Oui je pourrais, mais d'abord faut sucer. Ah ça va, je plaisantais, détends-toi. On a rien à faire là, ça doit être une erreur dans l'enchaînement des flashbacks. Ça devrait pas trop durer.
    431 Ça m'a l'air d'un bordel…
    432 Attention, on tourne à droite. (Ils se penchent à droite.) Un, deux, trois. Restabilisation. (Ils se redressent.)
    433 Attention, on va plonger.
    434 (Ils se penchent en avant.)
    435 Immersion de l'astronef.
    436 (L'astronef plonge.)
    437 J'ai un de ces mals de bide, moi. Ça c'est le hamburger, ça. J'arrive pas à le digérer. Tu avais raison, on aurait dû prendre une ouiche lorraine.
    438 Moi je suis sûr qu'on dit « quiche ». Enfin bon…
    439 M'emmerde pas avec tes histoires, je te dis que j'ai mal au bide, j'ai la méga chiasse, putain, la méga chiasse !
    440 Ben excuse-moi !
    441 Excuse-moi, mal au bide, tu sais ce que c'est ? Faut que j'aille chier, bordel de… faut que j'aille chier, faut que j'aille chier rapidos !
    442 Alors une, tu poses mon bouquin d'exercices isométriques tout de suite. Merci.
    443 Et deux, on pourrait savoir ce que tu fais dans mon bureau, s'il te plaît ?
    444 Rien. À part que je viens d'avoir une information qui mérite la une.
    445 La mort de George n'était pas accidentelle, il s'est fait assassiner.
    446 Et on peut savoir comment tu sais ça ?
    447 Ah ben c'est très simple, j'ai eu le tuyau par un dénommé Gorge Profonde.
    448 Ah ben merde alors, Gorge Profonde ? Mais c'est incroyable, ça.
    449 Moi maintenant de toute façon j'ai fait avancer l'enquête.
    450 Et on peut savoir, euh, ça veut dire quoi ça ?
    451 Mmh… rien. À part que toi et ton copain Peter vous êtes un peu à la rue.
    452 Eh mais t'es un minable ! Et tu te crois le meilleur journaliste du monde ? Mais c'est incroyable, ça.
    453 « Meilleur journaliste du monde, incroyable ça ! »
    454 Bon maintenant tu arrêtes ! Parce que je te ferais dire que pendant qu'on parle, Peter il a la méga chiasse.
    455 Alors un peu de dignité, s'il te plaît !
    456 Ah, et puis je voulais te dire un truc à propos de Gorge Profonde.
    457 C'est mon indicateur ! Alors, touche à ton cul.
    458 Excusez-moi, Messieurs.
    459 Euh, Peter il fait du boucan dans les waters.
    460 Wow. Steven ! Tu vas pas me croire. J'ai plus mal au bide. Je suis guéri. Par contre, on ne peut plus rentrer dans les chiottes, il y en a partout.
    461 Merde, allez ! (Ils courent vers l'ascenseur.) Patron ! Patron ! On a un problème, faut qu'on vous parle.
    462 Du dossier George Abitbol ?
    463 Non, des chiottes. Peter les a bouchées.
    464 Ce n'est pas de ma faute, patron.
    465 J'étais malade.
    466 Ça doit être les burgers.
    467 Allô, Peter ? C'est Steven. Alors, écoute bien ce que je vais te dire. Tu vas aller interroger un certain José.
    468 Mmh. Noter… Dire… Interroger. José.
    469 Par contre, il supporte pas les journalistes. C'est bon, là, tu notes, là ?
    470 Ben oui, je note. Alors…
    471 Donc vu que s'il sait que tu es journaliste, il te recevra pas.
    472 S'il sait… journaliste… pas.
    473 Ce que tu vas faire, c'est que tu vas te déguiser.
    474 Ce que je vais faire… déguiser.
    475 Eh, tu as tout compris ?
    476 Oui. Mais mon téléphone il marche pas.
    477 Et, tu vas te déguiser comment ?
    478 Ah, je sais pas encore.
    479 Ben, tu as intérêt à trouver un truc bien, hein. Non, mais euh, je te fais confiance, hein.
    480 T'inquiète ! Je vais trouver un truc bien.
    481 Ah, un restaurant mexican food. Zeb ! C'est pas vrai.
    482 Buenas noches.
    483 Mais tu parles espagnol ?
    484 Un poquito.
    485 Et tu crois que tu m'impressionnes ? Moi je sais dire « allons à la plage, monsieur renard » : « vamos a la playa, señor zorro ». Est-ce que tu aimerais te bâfrer un chili con carne ?
    486 Non, merci, je… je suis un peu ballonné.
    487 Je suis pas… je suis pas trop bien.
    488 Mmpf.
    489 Je suis désolé, hein. Il y a pas d'offense ? Par contre, la prochaine fois, avec plaisir. Un bon chili con carne, d'habitude, je suis partant. Mais là, je… je fais un régime, à base de… à base de ouiches lorraines.
    490 Excuse-moi, à base ?
    491 À base de ouiches lorraines. C'est des petites tartes.
    492 Eh, non mais pour qui tu me prends, je rêve ! La fromagerie en bas de chez moi, elle vendait trois choses : du fromage, des ouiches lorraines et de la bouffe chinoise. Alors toi, mec, avec tes régimes à la con, tu me fais bien marrer.
    493 Tu as devant toi le spécialiste de la ouiche lorraine.
    494 Le spécialiste des travers de porc sel-poivre. À vingt-trois ans j'ai gagné le concours du meilleur cuisinier asiatique en leur préparant un… un méchoui.
    495 Un méchoui ? Tu pipeautes pas un peu, toi ?
    496 Jamais je pipeaute.
    497 Eh bien puisque c'est ça, parle-moi de George Abitbol.
    498 George Abitbol c'était loin d'être un pérave. Jamais il se serait vanté comme je viens de le faire sur la cuisine. Humainement, il avait la classe. Moi je préfèrerais avoir sa classe plutôt qu'avoir la mienne.
    499 Moi je suis un peu just.
    500 Vous l'aimiez bien.
    501 Ouais.
    502 Ah, laissez-moi.
    503 Eh, la choucroute ! Si tu veux une saucisse…
    504 C'est trop bien de se déguiser.
    505 Mouais.
    506 Non non, je t'assure.
    507 Abitbol. George Abitbol. Classe, man ! Top of the pop. A disparu… poil au cul ! Au large du port de Valparaiso… Ah, c'est beau ! Mais tout ça nous éloigne de George.
    508 Ouah-pa-pa-doo-ah. Angoisse, fausse angoisse. J'ai plus de repères pour l'instant… Ouah-doo-da-doo-doo !
    509 Steven, arrête s'il te plaît, j'ai jamais pu encadrer Michel Legrand.
    510 D'accord, d'accord, cha-boo-da-doo-dee.
    511 J'aime pas comme tu conduis, je sais pas, j'ai pas confiance.
    512 Tais-toi, tu m'empêches de me concentrer.
    513 Quand je serai célèbre, je me ferai des meufs ! Mmh je ferai des folies ! Talalalalalalalal…
    514 Steven, arrête-toi c'est insupportable.
    515 Mmh mmh mmh mmh.
    516 (La voiture percute une camionnette, qui vole en éclats.)
    517 Tu sais, à propos de Steven c'est encore plus balaise que moi avec mon déguisement. Il traverse tout le pays pour une interview. Mais lui, il se met vraiment dans la peau du personnage.
    518 Je trouve ça vraiment courageux de traverser l'Amérique de fond en comble… à pied.
    519 C'est du journalisme total.
    520 Eh, il passe par l'Alaska, ce con !
    521 En plus, monter à pied là-haut, putain faut être con !
    522 Tu vois, moi, par exemple, autant au début je trouvais ça con de se déguiser, autant maintenant vous m'avez donné envie. Sauf que moi on va pas me reconnaître. C'est comme ça. Un vrai petit caméléon le Dave. Tu trouves pas que je me suis musclé ces derniers temps ? Tu veux voir mon déguisement ?
    523 Tu sais, faut le voir porté. Tu as déjà entendu parler d'Artemus Gordon ? Je pense que tu peux faire beaucoup mieux qu'une simple chemise.
    524 Ça c'est à peine croyable. Je me trouve une panoplie super bien. Une chemise dont je suis hyper fier, et voilà comment on le félicite, le Dave.
    525 Excuse-moi, mais là je pense à Steven. Je me dis qu'il a beau être à pied, il doit sûrement vivre des moments extraordinaires.
    526 Mon cher Peter, ça y est, j'y suis, même si mon déguisement n'est pas encore tout à fait fini ; la casquette ainsi que les bottes ne me conviennent qu'à moitié.
    527 Je sens grandir en moi la flamme qui a dû animer les grands reporters de ce siècle.
    528 Je pense à Albert Londres, Gunter Wallraff et autres Robert Namias.
    529 Entrez !
    530 Bonjour Monsieur, je suis journaliste et je fais une enquête sur la mort de George Abitbol.
    531 Je sais que vous avez vécu au Texas. Je voudrais recueillir votre témoignage.
    532 Je vous arrête tout de suite. Il doit y avoir erreur sur la personne, je n'ai jamais mis les pieds au Texas.
    533 Laissez tomber votre cinéma avec moi, je sais que vous y étiez.
    534 OK, c'est bon. Mais alors, il faut que je vous dise, je ne me souviens plus de grand-chose.
    535 À vrai dire, j'ai quelques souvenirs très confus. Des visages, comme ça, qui me reviennent de temps à autre.
    536 Je me souviens surtout d'odeurs, de sensations plus que d'anecdotes précises.
    537 D'autant plus que je ne suis pas resté longtemps au Texas.
    538 En fait, je ne vois pas ce que je pourrais vous raconter, si ce n'est deux ou trois vagues choses qui n'ont guère d'intérêt pour un journaliste.
    539 Alors une, je ne m'en souviens pas, deux je ne suis pas resté longtemps, et enfin cinq… il y a pas de cinq.
    540 Très bien. Puisque vous ne voulez pas m'aider, allez vous faire enculer.
    541 Mon cher Peter, me voici en Alaska, malgré le froid, malgré une mule impotente, malgré ma fausse barbe qui me gratte, je continue à croire en mon aventure.
    542 J'ai quand même deux ou trois doutes.
    543 Ben tu vois Dave, il commence à ressembler à quelque chose ton déguisement.
    544 Seulement avec ta tête de Français, là vraiment je suis pas sûr.
    545 Il y a beaucoup de boulot avant de faire comme Steven. Lui, c'est le meilleur.
    546 Je vais la métamorphoser ma tête de Français, tu vas voir. Tu vas pas en croire tes yeux.
    547 D'ailleurs moi aussi je vais au Texas, récolter deux ou trois témoignages.
    548 Sauf que moi je suis pas comme Steven, je prends l'avion.
    549 Mon cher Peter, j'ai perdu beaucoup de temps avec le blizzard.
    550 Je crois bien que j'ai pris froid.
    551 Alors les bouseux, qui va me parler de George ? Qui c'est qui va tout dire à Dave ? Bon, toi tu dis rien, c'est normal tu es une croix en bois, tu as qu'à te taire. Ah, voilà enfin quelqu'un qui va peut-être me dire quelque chose !
    552 OK, tu veux pas me parler, mmh ? Tu veux que je fasse parler la poudre ?
    553 À mon avis, tu me prends pour un con. Tu m'as l'air bien jeune pour avoir connu cette époque. Une vachette comme toi, ça sent le pipeau ton histoire. Le pipeau !
    554 Mon cher Peter, me voilà dans le désert. J'ai un nouvel ami, il me suit partout, mais il est un peu con.
    555 Tu me diras, il a cinq ans.
    556 Je me sens seul…
    557 Écoutez, on me l'a dit, que vous étiez fiancée à George.
    558 Ça, c'est ce qu'il voulait faire croire. Et… il y est arrivé.
    559 Vous êtes en train de me dire qu'il a menti ? Vous le traitez de menteur ?
    560 Oh oui ! Un menteur hors pair, et avec bien d'autres défauts que celui-là.
    561 Vous savez, il était amoureux de moi. Mais vous ne pouvez pas savoir ce qu'il était lourd, et collant.
    562 Bien sûr aujourd'hui, j'ai des regrets. Avec le recul je me dis que j'aurais peut-être dû agir autrement, mais c'était impossible. Parce qu'il y avait aucune femme qui aurait voulu de lui à cette époque-là. Il était trop balourd, trop pataud, il voulait pas me lâcher la touffe.
    563 Bonjour Madame.
    564 Madame. Je voulais vous dire, je vous aime.
    565 Ben ça on va le savoir, vous arrêtez pas de me le répéter. Vous savez bien que je ne vous aime pas, George.
    566 Oui, je sais bien.
    567 Mais alors, qu'est-ce que vous voulez ?
    568 J'aime vos seins. Vos loches.
    569 Les bras m'en tombent.
    570 Vous me trouvez pas désirable ?
    571 C'est pas ça, George. C'est pas que vous êtes pas désirable. Mais avec les femmes, vous manquez de tact. En gros.
    572 Dites donc, vos verres, ils sont crado.
    573 Et alors, je suis pas votre bonne !
    574 Ben, n'empêche qu'une fois que les choses réblblbl…
    575 George ! Je vous ai déjà dit de ne pas parler en buvant, c'est mauvais pour l'estomac.
    576 Burp !
    577 Excusez-moi Madame.
    578 Moi je pense qu'il avait pas plus de classe que de beurre au cul. J'ai jamais compris comment il a eu le titre. Pourtant, j'aimerais pas que l'homme qui l'a tué vous échappe.
    579 Eh, oh, ça va, hein. Il y a pas le feu, on n'est pas aux pièces.
    580 Mon cher Peter, je touche enfin au but.
    581 Que d'émotion devant cette simple bicoque tant désirée. Que d'émotion, mais que de fierté aussi.
    582 Hervé Claude, Jean-Claude Narcy, faites place, ténors du journalisme !
    583 J'arrive.
    584 Rentre, fouille-merde. Je vais t'en filer, moi, du biscuit sur George pour ta feuille de chou.
    585 Ça va fuser, les potins, les ragots.
    586 C'est ma profession, moi, de témoigner. Mes témoignages c'est pas de la daube.
    587 Mais je suis un peu surpris.
    588 Quand vous m'avez appelé, vous m'avez dit que vous aviez bien connu George et que vous aviez de vraies informations.
    589 Mais faut pas de vraies informations pour vendre un journal. La vérité, ça n'a jamais intéressé personne. Tiens, regarde George, par exemple.
    590 La vérité, c'est que pendant qu'il était peinard, à faire du cheval moi j'étais super loin sur mon bateau. À la pêche.
    591 Mais faut savoir la rendre excitante, la vérité.
    592 Moi à la pêche lui sur son cheval.
    593 Moi à la pêche lui le cheval.
    594 Ah ouais, c'est bon comme ça.
    595 Bon, on arrête les déguisements, hein.
    596 C'est que des emmerdes. Le journalisme total, c'est totalement con.
    597 Allez ! (Ils courent vers l'ascenseur.) Patron, patron ! Il faut qu'on vous parle, vite !
    598 Vous voulez me parler des chiottes, peut-être ?
    599 Nan, on veut vous parler de l'affaire Abitbol.
    600 On veut laisser tomber nos déguisements.
    601 On en a marre.
    602 Comme vous le sentez.
    603 Ah ah ah ah…
    604 Mais c'est le sympathique Dave que voilà. Il a remis son ancienne chemise ?
    605 Est-ce que vous voulez être ma femme, et après on boira un café ?
    606 Ça peut marcher.
    607 En y réfléchissant bien, je pense que notre histoire n'a pas une chance sur cent de marcher. On divorce ?
    608 Mmh, mmh, mmh, mmh.
    609 J'imagine que j'aurai pas de pension, radin !
    610 Monsieur, vous savez parler avec l'accent canadien ?
    611 Ben évidemment.
    612 Il y a qu'à demander.
    613 Mais dites-moi, George Abitbol, vous pouvez m'en parler ?
    614 Monsieur Dave…
    615 Comment vous connaissez mon nom ?
    616 J'ai vu le début du flim. Vous savez parler comme ça en plissant le visage ?
    617 Ça a l'air facile, hein ? En fait, c'est pas évident.
    618 Parlez-moi de George Abitbol au lieu de jouer.
    619 Mais vous pensez qu'à travailler ! Je parie que vous êtes même pas capable de parler comme ça.
    620 Mouais, ça c'est vrai.
    621 Ben faut apprendre, faut pas rester comme ça !
    622 On vit très bien sans savoir.
    623 Salut, ça va ?
    624 Écoute, j'ai un truc à te proposer, vachement bien, super balaise.
    625 On serait tous les deux complètement irresponsables, payés par la CIA avec un hélicoptère.
    626 Un hélicoptère ?
    627 Un super hélicoptère qu'on a intelligemment appelé Supercopter.
    628 Ouais.
    629 Vendu.
    630 Aaah !
    631 Oh les cons !
    632 Regarde, c'est lui, là.
    633 Qui, le jus de tomate ?
    634 Non, l'acteur !
    635 Dites-moi, vous pourriez nous parler de George Abitbol ?
    636 Essayez de trouver un moyen de raconter votre histoire, même sans ouvrir la bouche.
    637 Ou, ou, ou, ou, vous pouvez la mimer.
    638 Vous êtes un grand acteur, vous devriez pouvoir le faire, n'est-ce pas ?
    639 OK, je vais vous la mimer.
    640 J'étais à la cueillette aux champignons…
    641 Mais bordel, ça doit pas être la saison, c'est pas possible.
    642 Hep, Monsieur !
    643 Oui, quoi ? Vas-y, parle, qu'est-ce que tu veux ?
    644 Je vais vous poser une question, si vous répondez bien je vous laisse le passage.
    645 Vas-y, dépêche-toi, pose-moi ta question.
    646 Top ! Qui suis-je ? Je suis un animateur de France 3, je suis déguisé en noir.
    647 Mon émission passe tous les soirs à 18 h 35, je pose des questions à des champions, je suis ?
    648 Je suis ?
    649 Tu es… Tu es Julien Lepers, c'est ça ?
    650 Oui c'est ça, je suis Julien Lepers !
    651 Bien ! Sacré Julien.
    652 Hé ! Votre encyclopédie Larousse !
    653 C'est après cet épisode que j'ai croisé très furtivement George Abitbol.
    654 Mon chéri ! Nous étions séparés, mais quelle importance, nous sommes réunis.
    655 Tu vois cet homme, là ?
    656 Il est très connu. Par contre avant ça, c'était un parfait inconnu. C'est fou, non ? Qu'est-ce que tu en penses ?
    657 Je pense qu'il est très grand.
    658 Par contre, avant, il était petit.
    659 Hop hop hop ! Et notre répétition de scie musicale ?
    660 Excusez-moi maestro, je saluais des amis philosophes.
    661 Merci de ce témoignage. Dites, j'ai un trou de mémoire, vous pouvez me dire le titre de votre plus grand film ?
    662 Ou, ou, ou, ou, ou, nous le mimer.
    663 Oui, essayez de mimer le titre de votre plus grand film, s'il vous plaît.
    664 Putain, il est costaud cet acteur.
    665 Dis donc, je pensais à un truc. Tu l'as achetée où, ta veste ?
    666 En même temps que mon fute, chez un mec dans les Vosges, tu connais pas.
    667 Ah, ouais, ouais. C'est vrai que tu es vosgien, toi.
    668 Que je vous parle de George ?
    669 S'il vous plaît, oui.
    670 Ce que je peux raconter c'est que moi je l'ai jamais rencontré, George. Je sais que c'était l'homme le plus classe du monde, mais c'est tout.
    671 Moi, je suis un type qui a fait beaucoup pour l'écologie. Je vous assure, c'est vrai, hein.
    672 Tiens, si je vous disais qu'il y a rien que j'adorais plus que les longues chevauchées solitaires dans les grands espaces vierges. La communion intime avec la nature, l'extase des sens, un sentiment grisant de liberté, l'osmose, quoi.
    673 Dites-moi, à propos de George quelqu'un aurait eu intérêt à vouloir sa mort ?
    674 Vous lui connaissiez un ennemi, ou même un rival ?
    675 Oui, j'ai entendu parler d'un type, un dénommé Joël. Il avait un ami manchot.
    676 Abitbol !
    677 J'ai peut-être qu'un bras, mais… je suis pas manchot !
    678 Mais naturellement.
    679 En puissance intellectuelle, on va voir ce que tu vaux.
    680 Mais… avec plaisir.
    681 Très bien. C'est une devinette. Qu'est-ce qui a trois bras, un seul chapeau, deux chemises et une veste, un foulard, un pistolet et quatre oreilles ?
    682 Mais c'est toi, et ton…
    683 Mais aucun problème. C'est le cowboy de Tchernobyl.
    684 Bravo, il la connaissait !
    685 Au revoir, Messieurs-Dames. C'est ça, la puissance intellectuelle. Bac + 2, les enfants.
    686 Oh, ça sent la pluie, ça. On va rentrer, et on va s'inventer une petite charade. Et là, il sera bien feinté.
    687 J'espère que ce témoignage va vous faire progresser. Tous les moyens sont bons pour arrêter le meurtrier.
    688 Écoute-moi bien, garçon. L'affaire Abitbol, c'est pas une affaire pour vous, et mon patron n'aime pas trop les fouineurs.
    689 Alors, je vais te dire une chose.
    690 Il y a de la boue qu'il vaut mieux pas la remuer !
    691 Mmh mmh mmh.
    692 Qu'est-ce que tu dis ?
    693 Non, je demandais si on n'avait pas reçu mes tricots de peau en polystyrène expansé. Je comprends pas, ils auraient dû être là.
    694 Demande au standard.
    695 Ah merci, on se sent vraiment aidé.
    696 Oui, le standard, vous avez rien reçu pour moi ?
    697 Vous commencez à faire chier, Professeur, vous savez ça ? Bon, quittez pas j'ai un appel pour vous.
    698 Allô, oui, bonjour, Professeur Hammond.
    699 Professeur, j'enquête sur George Abitbol, et je voudrais vous poser deux ou trois questions sur votre père, Joël Hammond. Je pourrais avoir votre témoignage ?
    700 C'est bien. Actuellement, j'ai un léger problème de costume, je crois que mon tailleur se fout de ma gueule. Mais ça ne devrait pas tarder à s'arranger, je ne suis pas inquiet. Voyons-nous chez moi cet après-midi, mmh ? Vers cinq heures ?
    701 Attendez, faut que je me souvienne de tout. Chez vous, vers cinq heures… Bon, je vais essayer de m'en rappeler, hein.
    702 J'espère.
    703 Purée ! Ah, ah, ça, j'aime ! Ah ah ah, vous arrivez, vous êtes même pas chez vous vous vous pointez avec trois quarts d'heure de retard, pas bonjour, pas merci, vous filez tout droit au frigo, vous prenez la dernière bière…
    704 Ah ah, vous, vous êtes un sacré sans-gêne !
    705 Merci. Oh, arrêtez, vous me gênez, je vais rougir.
    706 En réalité, j'aimerais que que vous me parliez de votre papa. De Joël Hammond, c'est possible ?
    707 Bien sûr, c'est possible.
    708 Je vais vous raconter une histoire pas banale.
    709 Une fois, je devais rejoindre mon père Joël dans une carrière où il travaillait avec des ouvriers.
    710 Vive la révolution d'octobre ! Il paraît qu'on a repéré des animaux préhistoriques partouzeurs de droite dans les parages.
    711 Comment peux-tu croire des conneries pareilles ?
    712 Juste avant d'arriver au chantier, je m'étais arrêté quelques instants pour faire boire mon cheval.
    713 Oh, oh, oh.
    714 Regarde !
    715 Joël, n'y va pas, reste ici !
    716 Je reviens, je dois y aller !
    717 Aye, aye !
    718 Ouais !
    719 Eh ben, on l'a bien eu.
    720 Je déteste les animaux préhistoriques partouzeurs de droite, bordel ! C'est de la merde. Mélanger comme ça partouze et politique… C'est mieux de faire les choses dans l'ordre !
    721 Va te faire branler, trotskard.
    722 Voilà, et mon père vous allez me demander où il était pendant que nous on se battait ? Nan ?
    723 Dites-moi, votre père, où il était pendant que vous vous battiez ?
    724 Ah ah ah ah, Joël ? Mais il a fait comme à chaque fois qu'il y avait du grabuge ! Joël ? Ah ah ah ah !
    725 Aujourd'hui il est mort. Dieu ait son âme. Oh, je peux pas dire de mal mais pendant que nous on risquait notre vie contre les animaux préhistoriques partouzeurs de droite lui, comme à son habitude, il allait s'isoler dans la montagne.
    726 Personne n'a jamais su ce qu'il faisait, d'ailleurs.
    727 Ça daube, ça daube !
    728 S'il vous plaît, je peux vous parler, Madame ?
    729 Appelez-moi Christelle.
    730 Mon mari est absent. Vous voulez voir mes fesses ? Et ensuite, je vous roulerai une pelle ?
    731 Merci Madame, ce serait avec plaisir, mais d'abord je dois vous questionner.
    732 Comme vous voudrez. Mais après, il faudra être mignon avec moi.
    733 C'est bien. Je sais pourquoi vous êtes là. Vous cherchez quelqu'un qui aurait pu en vouloir à George, c'est ça ?
    734 George… Je faisais l'amour avec lui depuis le samedi après-midi jusqu'au vendredi soir. À ce moment-là, c'était un bon compagnon.
    735 Tu voulais me voir, chérie ?
    736 Oui, je voulais te voir. Je voulais absolument que tu sois là, je tenais à te présenter mon ex.
    737 Oh, tu es lourde.
    738 J'ai très bien entendu.
    739 Bon, excuse-moi.
    740 T'avise pas de recommencer. Yves, je te présente George, l'homme le plus classe du monde. George, je te présente Yves, mon ex.
    741 C'est lui, George ?
    742 Eh bien bravo. Permets-moi de te demander ce que tu fais avec un mec pareil.
    743 Blablabla, j'ai les bonbons qui collent au papier.
    744 Mon cher Yves, je vais te dire pourquoi je suis avec George. J'aime les hommes qui ont de la classe.
    745 J'ai envie d'aller aux gogues.
    746 Encore que parfois, il arrive que les apparences soient trompeuses.
    747 Pauvre Christelle. Ton mec, je vais lui massacrer la tête. Mais pas tout de suite, non, pas maintenant.
    748 Quand il s'y attendra pas.
    749 Pas très très courageux.
    750 J'en ai rien à foutre, d'être courageux. Ce que je sais, c'est qu'il va payer.
    751 Que ce soit demain, ou même dans vingt ans, il va mourir.
    752 Et il mourra pas de sa belle mort, crois-moi.
    753 Tu préfères pas qu'on fasse la paix, plutôt ?
    754 C'est tout ce que tu as à dire ? Fais quelque chose !
    755 Et qu'est-ce que tu veux que je fasse ?
    756 Je sais pas, moi, va te battre. C'est notre honneur qui est en jeu.
    757 Si c'est notre honneur, vas-y toi, te battre.
    758 George finit par se lasser de moi, alors il est parti avec une Québécoise. Une belle petite salope.
    759 À propos de salope, tout à l'heure, avant que vous commenciez votre histoire, vous m'aviez proposé de… comment dire… de faire le… j'aimerais bien passer à l'acte sexuel.
    760 Oh, je ne sais pas…
    761 Écoutez…
    762 Oui, oui.
    763 J'ai plus beaucoup de temps…
    764 Moi non plus.
    765 Alors il faut que vous preniez une décision. Moi je suis à bloc. Dites-moi si c'est oui ou si c'est non.
    766 C'est non.
    767 Allô Steven ?
    768 Bouge pas, Dave, Peter te prend sur l'autre ligne.
    769 C'est bon.
    770 Bien. Faisons un point. Je vais voir Yves dans son restaurant ça se passe plutôt mal.
    771 Quoi ? Tu es pas mort.
    772 Je me suis fait avoiner. Je me suis fait casser la gueule par un mec, une brute. Il voulait que je parle, mais j'ai rien dit du tout, j'ai pas dit où en était l'enquête, malgré la douleur.
    773 Encore heureux que tu aies pas dit où en était l'enquête, parce que vu qu'on en est au point zéro, si tu l'avais dit on passait pour des busards.
    774 Pourquoi Yves t'envoie son gorille alors que d'après son témoignage il est innocent ?
    775 C'est ça, c'est à n'y rien comprendre, même en y réfléchissant bien ! Un mec que rien ne permet de soupçonner m'aiguille sur Joël, le rival de George, puis me fait dérouiller par son homme de main. Pourquoi ?
    776 Oui, pourquoi, pourquoi, pourquoi ?
    777 Les enfants, écoutez. Je crois que j'ai le fin mot de l'histoire. Suivez bien. George Abitbol s'est fait assassiner par Yves. Le mobile : une femme, Christelle. Sexe plus histoire de cul égalent meurtre.
    778 Bien joué Peter, l'enquête touche à sa fin ! On va devenir célèbres !
    779 On va bientôt niquer, on va bientôt niquer !
    780 Smack ! Mettez des capotes.
    781 Gorge Profonde ? Gorge Profonde ?
    782 Gorge Profonde, vous avez demandé à me voir ? Vous avez des révélations ?
    783 Oui.
    784 J'ai des révélations d'une importance extrême. George Abitbol est pas crevé. Il est même vivant et pff…
    785 Mais vous êtes ivre, Gorge Profonde, vous empestez, vous ne savez plus ce que vous dites. Abitbol est mort.
    786 Pas du tout du tout. George est vivant. Et il est revenu en ville.
    787 C'est moi qui te le dis, petit merdeux, va. George il est bien vivant, merde. Et il est revenu pour se venger. Voilà. Et l'assassin de George, eh ben c'est Yves.
    788 Ça, on le savait.
    789 Monsieur Je-sais-tout ! Eh bien puisque t'es si malin, tu vas te démerder tout seul.
    790 Et moi, ma gorge profonde, je m'en vais la remplir derechef.
    791 Qu'est-ce que c'est ? Il y a des voitures dans les parkings maintenant ?
    792 Je te connais pas, j'ai rien contre toi, mais il faut que je tape sur quelqu'un. C'est pas de bol pour toi, sinon je garde tout en dedans et c'est pas bon, alors tiens !
    793 Le prends pas mal, mais tiens !
    794 Mais qu'est-ce que c'est que ce raffut ?
    795 Alors, on peut plus chier tranquille ?
    796 Abitbol, soi-disant l'homme le plus classe du monde !
    797 Du calme, Gaël, du calme.
    798 Quoi du calme ?
    799 Du calme.
    800 Pourquoi tu dis ça ?
    801 Babloche !
    802 Mais oui, je suis un bab, et alors ? Ça te défrise, vieux réac ? Parce que j'ai les cheveux longs, tu flippes pour ton confort bourgeois. Tu as un mauvais karma, frère, si tu supportes pas les cheveux.
    803 Désolé papy, mais j'ai ma liberté d'expression capillaire.
    804 Ça te fait chier, hein, dis-le, George.
    805 Ah ! Putain tu es nul !
    806 Messieurs, George Abitbol.
    807 George !
    808 Mais tu es vivant.
    809 Un miracle ! Il marche !
    810 Bon, on va pas en faire un fromage. Je m'en suis sorti sans problème. C'est pas vrai, cette affaire. Qu'est-ce que c'est, qu'est-ce que c'est ce pataquès ? Je suis là pour une raison précise.
    811 Je veux l'adresse de l'homme qui a voulu me tuer.
    812 Yves ?
    813 Ouais.
    814 OK, j'imagine l'état dans lequel vous devez être.
    815 Mais comportez-vous en bon américain, George. Faites honneur à votre drapeau.
    816 Vous devez laisser la justice faire son boulot.
    817 Croyez-nous, on aimerait bien vous aider. Seulement, on l'a perdue, cette adresse.
    818 Alors même, on voudrait vous la donner, qu'on pourrait pas.
    819 Mais vous me prenez pour une buse ? Je suis l'homme le plus classe du monde, bande de cons.
    820 Du calme, Abitbol.
    821 Vous méritez même pas que je m'énerve. Je vais me débrouiller sans vous. Merci pour votre aide.
    822 Il a vraiment pris la grosse tête.
    823 Alors George, qu'est-ce que tu veux comme tuyau ?
    824 Trouve-moi l'adresse du type qui a voulu m'assassiner. Ça me fera plaisir.
    825 Tu sais, je commence à en avoir plein le cul.
    826 Ouais, plein le cul. Non, mais c'est vrai.
    827 C'est pas une raison, parce que je donne à tout le monde des bons tuyaux, que je mérite pas un peu d'amour.
    828 Tu as raison Huggy, je t'aime.
    829 Ah oui ? C'est pas croyable. Il faut que je m'énerve, que je te fasse mon numéro, pour que tu me le dises ?
    830 Hin hin hin hin, tu nous fais ta crise ? Ta petite parano ? Hin hin hin hin.
    831 Hé, pour le feu, merci pigeon.
    832 Et toi, ton tuyau tu as qu'à te le mettre dans le cul.
    833 Huggy, j'ai vraiment besoin de toi. S'il te plaît. Donne-moi l'adresse d'Yves.
    834 D'accord, mais seulement pour du fric.
    835 Ça te coûtera 30 francs.
    836 Ouais.
    837 Payables en deux fois. 15 francs avant, 15 francs après.
    838 Allez ! (Ils courent vers l'ascenseur.) Patron, patron ! Il faut qu'on vous parle, vite !
    839 Vous savez que George sort de mon bureau ?
    840 Rien à foutre de ça, il y a plus important.
    841 George Abitbol est vivant, bien vivant.
    842 Bien joué, les gars.
    843 Yves ? C'est moi, George.
    844 T'inquiète pas, je ne te ferai rien. Je suis venu pour faire la paix, pas dans un esprit de vengeance.
    845 Je sais que c'est toi qui as essayé de m'assassiner. Je sais aussi que tu t'es jamais remis de l'histoire de Christelle.
    846 Mais c'est du passé. Tournons-nous plutôt vers l'avenir. Ce que je veux c'est que tu t'excuses gentiment.
    847 Ouais, je m'excuse.
    848 Excuse-toi mieux que ça.
    849 Ben, euh, pardon, euh, je te prie de m'excuser.
    850 Pardon mon doux seigneur.
    851 Pardon, mon doux seigneur.
    852 Éteins ta clope.
    853 Monsieur Peter !
    854 Quoi ?
    855 Tenez, vous avez un message de Dave.
    856 Vous avez une clope ? Merci.
    857 Il est parti chercher George dans l'hôtel de Yves.
    858 Hum.
    859 Merci pour la clope, grosse vache.
    860 Bonne journée !
    861 Merci.
    862 Dites-moi, vous pouvez me donner l'heure, s'il vous plaît ?
    863 Oui, neuf heures une.
    864 Oh, vous êtes précis, vous.
    865 Oui. Vous voulez niquer avec mon ami et moi ?
    866 Ben oui, pourquoi pas ?
    867 Répétez ce que vous venez de me dire ? Vous avez bien dit « Oui, pourquoi pas ? », c'est bien ça ?
    868 Oui, exactement.
    869 Suivez-moi. C'est quoi votre prénom ?
    870 C'est Sophie, mais tout le monde m'appelle Sosso. Mais… mais qu'est-ce que j'ai dit ?
    871 Il faut que je vous présente Steven. (Il l'emmène vers Steven.) Steven ! Laisse tomber ce connard. Victoire, vieux, victoire ! Viens voir par ici, viens ! Madame Sosso, je vous présente Steven. Steven, madame Sosso.
    872 Mademoiselle.
    873 Asseyez-vous. Tiens, prends une chaise. Dites-lui ce que vous venez de me dire.
    874 Eh bien je lui ai dit que je voulais bien niquer avec vous.
    875 Tu entends ça ? Qu'est-ce que tu en dis ?
    876 Outch.
    877 Et en plus, on n'est pas célèbres, on n'a pas publié encore une seule ligne ! Alors pourquoi ?
    878 Ben parce que je m'en fous, de ça. J'ai pas de problème.
    879 Vous avez l'air tous de tomber des nues.
    880 Vous pouvez pas savoir ce que ça représente pour nous.
    881 Je flashe.
    882 Si je comprends bien, on s'est tapé une enquête super dure alors que si on vous avait rencontrée avant, on aurait pu niquer tout de suite sans même être célèbres.
    883 Alors que moi, pendant ce temps-là, je me la suis donnée grave.
    884 Allez ! (Ils courent vers l'ascenseur.) Patron, patron ! Il faut qu'on vous parle, vite !
    885 On veut savoir si on peut prendre notre après-midi.
    886 C'est-à-dire qu'on a un plan, là.
    887 Attendez les gars.
    888 On sait pas encore ce que veut dire « monde de merde ».
    889 « Monde de merde », « monde de merde »… Ah oui !
    890 Mais Dave est parti chercher George.
    891 Comme ça, dès qu'ils reviennent, on demande à George d'expliquer « monde de merde ».
    892 OK les gars.
    893 Ça va bien, Monsieur Abitbol ? Vous avez passé une bonne nuit, sans être indiscret ?
    894 Au poil. Et tu es pas indiscret. Je suis majeur, et je fais ce que j'ai envie de faire avec mon petit corps.
    895 Dites-moi, pendant que je vous tiens, là, ça veut dire quoi « monde de merde », sans être indiscret ?
    896 Tu te réveilles à 35 ans pour te demander ce que ça veut dire « monde de merde » ? C'est pas que tu es indiscret, c'est juste que tu es un con.
    897 En disant « monde de merde », j'ai voulu dire que le monde allait mal. C'est un cri de révolte que j'ai lancé à mes frères opprimés.
    898 Finissons-en avec la résignation et l'indifférence.
    899 Ouvrons les yeux ! Partout l'injustice, le nationalisme, l'exclusion, ça me débecte.
    900 Tu as déjà entendu parler de l'hégémonie du grand capital ?
    901 Nan.
    902 Tu t'intéresses pas à la politique.
    903 Ben tu devrais. Faut se mettre au travail, afin de vaincre les fanascismes.
    904 C'est un concept à moi, ça dénonce à la fois les fascistes et les fanatiques.
    905 Merci Monsieur Abitbol, vous m'avez ouvert les yeux.
    906 Regarde plutôt la route.
    907 Ah, monde de merde !
    908 Ouais moi aussi j'ai bien envie de le dire. Monde de merde